Amnesia : A Machine for Pigs

 

 

Sorti en 2010, Amnesia : The Dark Descent fut un véritable succès propulsant immédiatement l'équipe de Frictionnal Games, déjà auteur de la bonne surprise qu'était la trilogie Penumbra, sur le devant de la scène des développeurs indépendants. Visiblement peu intéressés par la volonté de prolonger l'histoire et trop occupés à réaliser un autre Survival du nom de SOMA, ils ont préféré déléguer la gestation d'une suite à The Chinese Room, autre petit studio indépendant dont l'énigmatique Dear Esther avait lui aussi cartonné lors de sa sortie en 2012.

L'une des grandes forces de The Dark Descent, outre son ambiance cauchemardesque et la paranoïa qui s'installait dans l'esprit du joueur à chaque nouveau corridor emprunté, était son gameplay bien plus inspiré et profond que la majorité des jeux d'horreur à la première personne se trouvant à la pelle sur PC. Le jeu possédait par exemple une gestion de la lumière avec des bougies à allumer et une jauge d'huile à surveiller pour sa lanterne, une exposition trop prolongée à la pénombre faisant chuter la santé du mentale du héros. Le système était imparfait mais intéressant et c'est donc l'un des premiers chocs quand on lance ce Amnesia : A Machine for Pigs, car si le moteur graphique est identique au premier opus (on retrouve la version 2 du HPL Engine déjà utilisée sur The Dark Descent), The Chinese Room a malheureusement décidé de modifier en profondeur la formule ayant fait le succès du jeu de Frictionnal Games.

Adieu la gestion de la santé mentale, l'amadou pour allumer des bougies, le laudanum pour se soigner ainsi que l'huile pour la lanterne. Á vrai dire il n'y a même plus d'inventaire, les objets servant à résoudre des énigmes se trimballant à bout de bras sur de courtes distances. Les seuls éléments faisant penser à l'original sont l'interactivité avec les décors (cependant bien moins présente qu'auparavant et aussi bien moins utile pour résoudre des d'énigmes), une petite lanterne électrique apportant la lumière dans l'obscurité et une grosse quantité de documents, car oui, si le gameplay a été raboté c'est pour mettre le scénario et l'atmosphère au cœur de l'expérience.

    

  

Comme dit un peu plus haut, The Chinese Room s'est fait un nom grâce à Dear Esther, un mod d'Half-Life 2 dont le remake sorti en 2012 avait beaucoup fait parler de lui, non seulement pour ses fortes qualités graphiques et narratives mais aussi pour son absence totale de gameplay et son côté "simulation de promenade". Ce système ayant tout de même convaincu, il n'est pas étonnant de les voir réutiliser ce procédé pour A Machine for Pigs. L'histoire est ici le squelette et le "jeu" la chaire et les muscles posés dessus. L'angoisse et le malaise attendu lorsqu'on lance un jeu portant la mention Amnesia ne se retrouvent donc pas dans le gameplay, les quelques séquences de cache-cache avec les monstres n'ayant aucune substance (la faute à un respawn quelques pas en avant sans aucune autre forme de malus) dans un scénario fortement inquiétant dont je me garderais évidemment de vous dévoiler les tenants et aboutissants mais dont je me permets toutefois l'exposition du pitch de départ en quelques lignes.

N'ayant rien à voir avec le premier opus, hormis quelques clins d'œil, l'histoire place le joueur dans les souliers de Mandus, un riche industriel ayant fait fortune dans le domaine de l'abattage de porcs, qui se réveille le soir du 31 Décembre 1899 dans sa maison à Londres et qui s'aperçoit de l'absence de ses enfants. Lors de ses pérégrinations pour retrouver ses progénitures (pas facile à dire), il reçoit des appels sur des bornes téléphoniques d'un homme qui l'informe que ses rejetons sont prisonniers dans les dédales d'une gigantesque "Machine" industrielle construite sous terre et dont Mandus semble être l'ingénieur. Je n'en dirais pas plus mais sachez que l'histoire vaut à elle seule l'achat du jeu. Outre son aspect bien moins nébuleux que celle du premier, elle se permet d'aborder des sujets profonds et intéressants comme par exemple l'industrialisation de la cruauté (ou la cruauté de l'industrialisation) et ses répercutions sur l'être humain. L'intrigue est de plus sublimée par d'excellents doublages anglais et une bande-son aux petits oignons dont les compositions musicales sont d'ailleurs signées Jessica Cury, la directrice de The Chinese Room.

     

  

Au final que penser de cet Amnesia ? Si vous attendez une véritable suite avec un gameplay aussi élaboré que celui de The Dark Descent vous risquez d'être fortement déçu car une grande partie de ce qui en faisait son charme a tout simplement été supprimé. Par contre, si vous recherchez une histoire originale, à l'atmosphère délicieusement malsaine et abordant des sujets sérieux au travers de personnages bien écrits alors le titre de The Chinese Room est fait pour vous. Même s'il donne parfois l'impression d'être un mod plutôt qu'un vrai jeu (comme un certain Dear Esther), A Machine for Pigs reste un bon titre dont la plus grande malédiction est de porter le nom "Amnesia", un fardeau qui l'empêchera malheureusement de s'élever au niveau de son prédécesseur mais qui ne lui enlève en rien ses excellentes qualités narratives.


Description du jeu par Zombiedu05

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