Test de Lucius

Lucius

 

 

Si vous vous intéressez au cinéma et plus particulièrement aux films d'horreurs, vous êtes obligé de connaitre, ne serait-ce que de nom, la saga "The Omen" - grande concurrente à l'époque de la saga "L'exorciste" - dans lequel Damien, fils du diable, fait ses premières armes dans son enfance en tuant ses proches... avant de s'essayer à conquérir le monde une fois adulte ! "Lucius" s'inspire très fortement de cette série de films, surtout du premier, et nous permet pour une fois dans un jeu d'incarner le mal en personne dans le corps d'un petit garçon au teint pâle mais au regard diabolique. L'expérience est unique, mais cela suffit-il à en faire un bon jeu ?

Lucius, enfant de Lucifer, né un 6 Juin 1966, habite avec ses parents biologique et une partie de sa famille dans un grand manoir bourgeois. Il côtoie au quotidien domestiques, jardinier, tuteur ainsi que le reste du personnel. Son objectif est simple, il doit tous les tuer pour gagner en puissance car chaque meurtre est une offrande de plus au royaume des ténèbres. Cet enfant du diable doit bien entendu agir en toute discrétion et déguiser chaque homicide en accident pour que personne ne le suspecte jamais. Semer le trouble autour de vous sera donc votre priorité puisque le titre vous proposera d'envoyer six pieds sous terres plus d'une quinzaine de personnes. Parallèlement à vos méfaits, vous suivrez l'enquête d'un détective qui essayera de relier chaque meurtre pour découvrir ce qui se cache réellement sous cette vendetta. Sans aucun rebondissement ni particularité, le scénario ne restera qu'un prétexte à votre tuerie de masse. Dommage, le jeu se prive d'un atout qui aurait pu rattraper moult défauts.

    

  

"Lucius" est donc un pur ambient-horror. Place donc aux moment d’ambiance et de réflexion plutôt qu'aux scènes mouvementées même si celle-ci restent plus fréquentes que les autres jeux du genre.

L'ensemble du titre se déroule dans le manoir et chaque chapitre vous imposera votre future victime. Le jeu est très linéaire et le gameplay consiste à trouver comment parvenir à vos fins. Il n'y a d'ailleurs, à chaque fois, qu'un unique moyen de commettre vos méfaits. Pour résoudre ces sortes d'énigmes mortelles, il vous faudra fouiller la demeure de fond en comble et compléter au maximum votre inventaire d'objets qui vous serviront dans un ou plusieurs chapitres. Il est donc possible d'être en possession d'un objet clé qui ne vous servira en fait que dans quelques heures, comme il est possible de ne pas encore avoir trouvé l'item qui devrait vous servir immédiatement. C'est la seule liberté que vous accordera le jeu, mais il faut reconnaitre que l'idée est bonne. Vous partirez surement sur quelques fausses pistes en imaginant un plan selon votre inventaire qui ne sera au final pas le bon. Mais cette mécanique est aussi le défaut de "Lucius". Etre cantonné à une seule possibilité de tuer votre victime pour chacun des meurtres est très contraignant et bride notre imagination malsaine !

En plus de la recherche d'objet, vous pourrez utiliser des pouvoirs au nombre de quatre qui se débloqueront au fur et à mesure de votre progression : la télékinésie, le contrôle des pensées, l'effacement de mémoire et la pyrokinésie. Pour venir à bout du majordom par exemple, il faudra utiliser aussi bien vos objets que vos pouvoirs.

    

  

En plus des phases meurtrières, le jeu vous imposera quelques passages d'infiltration et d'action. Les premières se déroulent souvent de nuit, vous ne devrez pas vous faire repérer sous peine d'être renvoyé dans votre chambre. Il faudra alors soigneusement éviter tous les adultes en s’enfermant par exemple dans des cagibis en attendant que notre mère termine sa ronde. Je ne suis pas certain que les joueurs d'ambient-horror apprécie ce genre de mécanique de jeu mais certaines sont mémorables malgré le fait qu’elles soient délicates. Les phases d'actions sont par contre horriblement dures et ratées, heureusement qu'il n'y en a que deux et qu'elles sont très courtes ! Action et infiltration dynamisent tout de même un peu le jeu et empêchent la monotonie qui pourrait rapidement s'installer si les joueurs devaient aller d'homicide en homicide sans aucune autre coupure.

Jusque-là "Lucius" à tout du jeu plein de potentiel mais malheureusement ce potentiel n'est pas exploité à 100%. Outre son scénario inexistant, l'atmosphère global du jeu aurait pu… aurait dû faire la différence ! Les développeurs ont pourtant tenté de créer une véritable ambiance mais le travail n'a pas été suffisant. Car oui c'est un manque de travail et non de budget qui plombe définitivement le jeu. Je m'explique, la dimension atmosphérique se divise en trois parties :

- La partie horrifique. De ce côté-là il convient de noter la créativité de chaque mort et les cinématiques gores qui n'épargnent aucun détail au joueur. Vous verrez du sang, des décapitations et des victimes aux traits horrifiés. Mais le problème vient du fait que la "peur malsaine" qui devrait exister n'apparait nul part dans le jeu. Bon sang, un gamin de 6 ans, fils du diable et tueur en série, ça devrait donner lieu à des scènes immorales et, je le répète malsaine ! Pourtant pas une seule fois Lucius ne dira un mot. Le personnage que vous dirigerez restera muet du début à la fin. Pourquoi ne pas nous avoir gratifier d'une cinématique avec des "je t'aime maman" à l'intonation et au regard qui en diraient long ? Pourquoi, alors que le but est de rester discret, Lucius ne joue pas la carte de l'hypocrisie en étant gentil et attentionné avec les gens autour de lui pour mieux les assassiner par derrière ? Pourquoi faut-il se coltiner une tombe sans aucune personnalité le long des 8h de jeu ? Car si son physique fait émerger un certain charisme, cela ne suffit pas sur la longue durée ! Il y avait tellement mieux à faire…

    

  

- L'ambiance de la vie dans la demeure. Elle tient une place importante dans ce jeu, mais là aussi le travail est baclé. En premier lieu, le titre ne prend pas le temps de présenter ses personnages, ainsi toutes les victimes sont massacrées d'heure en heure sans aucune once d'émotion pour quelqu'une d'entre-elles. La faute aussi à Lucius qui ne dialogue après tout avec personne. Il suffisait pourtant d'instaurer quelques échanges entre par exemple la cuisinière et le petit garçon pour que le joueur s'attache un tant soit peu à elle. D'ailleurs le jeu aurait même dû présenter en introduction tous les résidents pour éviter la découverte de certain membre du personnel au cours des chapitres. Ce point est, je trouve, très embêtant, puisque Lucius est quand même censé tuer à la chaine des personnes qu'il côtoie depuis six années. Hors, ça, le joueur ne le ressent pas une seule seconde.

- La vie dans le manoir. A première vue tout va bien, tout le monde vaque à son occupation. Cependant les personnes croisées dans les couloirs débitent chacun une petite phrase qui ne changera que très rarement. Et en grattant un peu, les PNJ ne sont quasiment assignés à aucune tâche. Ainsi le grand père restera tout le jeu dans son bureau alors que notre mère errera sans aucun but dans les couloirs. Des jeux antérieurs comme Gregory Horror Show ou Deadly Premonition avaient au moins la décence d'organiser une journée type pour chaque PNJ et donc renforcer leurs personnalités. Le pire c'est que "Lucius" se déroule sur plusieurs mois, la météo change au dehors mais les résidents font toujours la même chose de mois en mois sauf cas particulier car utile au scénario. Comment voulez-vous établir une ambiance digne d'un huis-clos pesant avec ça ? C'est impossible, tout simplement impossible ! Je refuse de dire du bien d'un jeu qui se déroule dans un lieu unique et dans lequel le personnage de la "maman" demandera au personnage que je contrôle d'aller se brosser les dents à chaque fois qu'elle le croise dans un couloir, et ce durant plus de six mois…

    

  

Non vraiment, cet opus avait un fort potentiel mais est plombé par des choix artistiques désastreux. Je ne parle même pas des bugs en tout genre comme celui des collisions dans lequel les personnages passent leur tête à travers des portes lors du quart des cinématiques. Je ne parle pas non plus des musiques omniprésentes qui s'enchainent en boucle en suivant une tracklist ne se calant jamais sur les évènements que vous serez en train de vivre (j'ai même fini par les désactiver avant de les remettre en baissant très bas le volume pour ne pas devenir fou !).

Reste quand même le plaisir de résoudre la manière dont charcuter chaque victime et de parcourir cette magnifique bâtisse à l'architecture bien pensé. Sans être foncièrement catastrophique, "Lucius" reste beaucoup trop moyen et surtout sans aucune personnalité… quel dommage, j'en attendais beaucoup…


Description du jeu par Kyoledemon